La bonne vieille recette de la vérité

7 avril 2012Francis Poulin
Catégorie : Culture

Pour exercer son pouvoir citoyen aujourd’hui, être bien informé est une nécessité. L’accès à l’information est , selon le Conseil de presse du Québec, « une condition essentielle à l’existence d’une presse libre et à la satisfaction et au respect du droit du public à l’information. » Dans cet esprit, si l’on dresse un bilan de santé de la démocratie dans notre pays, on arrivera à certaines conclusions positives : bonne circulation sanguine des idées, organes médiatiques bien formés et fonctionnels, etc. Ceci dit, d’autres problèmes se sont développés sur le long terme : obésité découlant d’une surinformation, déformation congénitale due à la concentration génétique des entreprises de presse et surtout une grave cécité du public surexposé à la télévision, au manque de transparence et du port trop fréquent de lunettes 3D. Existe-t-il un remède à ce manque de transparence ou est-ce un cas de quarantaine?

Le sirop du Docteur Harper

Dans une sortie publique de la majeure partie des associations professionnelles de journalistes à travers le Canada, le constat était le suivant : « Sous le règne du premier ministre Stephen Harper, l’information émanant d’Ottawa s’est tarie. Les ministres et les fonctionnaires sont muselés. Les demandes d’accès à l’information sont ralenties et parfois bloquées après intervention politique. » Le général de Harper au Québec, M. Christian Paradis, avait en février dernier appliqué la recette à la lettre lorsque le bureau de ce dernier censura un document ministériel qui avait été demandé par le biais d’une demande d’accès à l’information. Pour les journalistes, la colline parlementaire est devenue une immense salle d’attente engorgée par le secret et le contrôle de l’information : « Les demandes se soldent par des mois d’attente, du caviardage inutile, et même de l’interférence politique. »

Le remède de grand-mère

L’Histoire nous démontre par contre que l’obscurantisme et le secret a souvent été renversé au profit de réformes des institutions qui contrôlaient « la vérité ». Il y a près de 500 ans, Martin Luther, un moine allemand, déposait 95 thèses qui mettaient en cause les vérités acceptées dans l’Église catholique, dénonçant les pratiques du clergé, l’interprétation de la Bible, le Purgatoire, etc. Cette dénonciation a réformé la religion catholique et fait de lui l’un des premiers « whistleblower », ces dénonciateurs qui cherchent la transparence à travers la publication de faits contradictoires ou gardés sous le sceau du secret. Il en fut de même pour les employés de Hugues Microelectronics qui dénoncèrent leur employeur qui utilisait des puces non-testées pour des systèmes de guidage de missiles, de Daniel Elsberg face à la corruption du gouvernement Nixon ou encore de MaChouette à propos du scandale des commandites. Le petit dernier de cette lignée historique, c’est le projet web Wikileaks qui permet de faire « couler » de l’information hors du contrôle et de la censure, et ce, de façon anonyme et encryptée. Cette bonne vieille recette épicée à la sauce web 2.0 sera-t-elle garante des mêmes changements sociaux ? Ce ne sera certainement pas les fameux States logs, série d’information sur la diplomatie étasunienne, qui le feront, mais qui sait quelle sera la teneur des prochains documents ? La fraude bancaire, la torture, la planification d’un mensonge planétaire ? Ce n’est certainement pas les maladies qui manquent.


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