Vers une douce tyrannie ?

9 avril 2012Isabelle Giguère

Depuis les derniers sommets internationaux du G8, à Kananaskis (juin 2002), et le Sommet des Amériques, à Québec (avril 2001), on assiste peu à peu au durcissement de la répression policière à l’endroit des manifestants. Pourtant, la Charte canadienne des droits et libertés garantit le droit de se réunir pacifiquement ainsi que d’autres libertés fondamentales à la base de tout système de gouvernement dit démocratique.

Au Canada, la gestion du maintien de l’ordre public au cours des sommets internationaux induit le plus souvent un recours systématique à des effectifs et du matériel de sécurité de haut niveau. Le corps policier ne suffit plus! Il faut donc déployer des équipes d’intervention, des tireurs, des forces spéciales, des unités anti-émeutes en plus des forces de la Gendarmerie royale, de la police provinciale et de la police municipale.

À Huntsville, le maintien de l’ordre public a été assuré par une utilisation très discrète de la force, sans aucune éclaboussure. À Toronto, cependant, on a assisté à un usage excessif de la force et à des vagues d’arrestations massives. Oui, dans la Ville-Reine, on a battu le triste record historique du plus grand nombre d’arrestations jamais enregistré.

Respect des droits et libertés fondamentales ?

Selon le rapport préliminaire d’observations de l’Association Canadienne des Libertés Civiles, « plus de 900 personnes ont été arrêtées par la police ». Ces perquisitions auraient été faites de manière tout à fait arbitraire dans les rues de Toronto. Toujours selon le rapport, les détenus se seraient, semble-t-il, fait dénier leur droit de parler à un avocat ainsi qu’à leur famille.

La Charte canadienne des droits et libertés garantit un bon nombre de droits et de libertés fondamentales aux Canadiens et Canadiennes. Dans les articles 2(b) et 2(c), la liberté de pensée, de croyance, d’opinion, d’expression et la liberté de réunion pacifique sont décrites comme des droits et libertés fondamentales. De plus, la charte garantit le droit à la sécurité, assure des protections contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives et limite les conditions de détention. Être prisonnier sans motifs véritables — ou d’ailleurs ne pas être au fait des motifs de son arrestation — et être dépourvu de l’assistance d’un avocat sont des situations qui foulent aux pieds les valeurs démocratiques !

Gestion efficiente des dépenses publiques ?

Selon le rapport du Bureau du directeur parlementaire du budget sur l’évaluation des coûts prévus de la sécurité aux sommets du G8 et du G20, qui décrit bien la structure des dépenses encourues, les principales enveloppes budgétaires ont été octroyées à la Gendarmerie royale du Canada, au Ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile, au Ministère de la Défense nationale et au Service canadien du renseignement de sécurité. Il faut dire qu’actuellement, la tendance en gestion du maintien de l’ordre induit le recours systématique à des méthodes d’infiltration des groupes dissidents, leur surveillance et le recours aux services de renseignements.

Le passage d’une gestion policière de compromis vers une autre qui est davantage réactive et répressive est perceptible. Les forces de l’ordre veillent désormais au maintien de l’ordre à coups de gourdin et de gaz lacrymogènes ! En conséquence, on assiste à une explosion des dépenses en sécurité aux frais du contribuable. Par l’érection du périmètre de sécurité, la clôture, les tactiques de surveillance et le maintien à distance des manifestants, la priorité des forces de l’ordre s’est clairement imposée comme étant de protéger les dirigeants — et d’assurer le bon déroulement des activités — plutôt que de protéger la population. Plus de 900 personnes se sont fait dénier leurs droits et libertés fondamentales, mais ce sont tout de même elles et le reste des contribuables, qui financeront le fardeau de la dette.


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