Les femmes sont-elles libres en 2013?

6 mars 2013Geneviève Giroux
Catégories : Féminisme , Société

Qu’est-ce qu’être libre? Il faut le savoir avant de pouvoir répondre à la question. La Charte canadienne des droits et libertés dit que les libertés fondamentales sont : la liberté de conscience et de religion; la liberté de pensée, de croyance, d’opinion et d’expression, y compris la liberté de la presse et des autres moyens de communication; la liberté de réunion pacifique; et la liberté d’association.

Dans le dictionnaire en ligne de Larousse, on donne comme définition du mot « liberté » : « État de quelqu’un qui n’est pas soumis à un maître ». Dans un autre dictionnaire, on précise davantage la définition: « 1. état d’une personne qui n’est pas asservie à une autre. 2. situation d’une personne qui n’est pas retenue captive. 3. possibilité d’agir, de choisir sans contrainte. »

Si on se compare avec les femmes de pays moins favorisés ou de pays avec une culture où l’homme est le « patron », on peut dire qu’au Canada, les femmes sont libres. Comme on dit : « quand on se compare on se console ».

Mais faut-il toujours se comparer à pire pour finir par se dire que c’est acceptable? Au Canada, les femmes sont-elles libres, oui ou non? Non, elles ne le sont pas! Une personne vraiment libre, c’est une personne qui a les mêmes droits qu’une autre, qui n’a pas à négocier contre plus fort qu’elle, qui n’a pas de permission à demander, qui n’a pas peur!

Les femmes se battent encore pour être libres de tout et de rien. Les femmes se sentent libres en apparence, mais pas aussi libres qu’elles le disent. Pourquoi? Parce qu’elles doivent avoir l’air libres, avoir l’air d’avoir choisi de rester à la maison à moucher des nez qui coulent et à changer des couches en se sentant très heureuses de passer la journée seules avec bébé, sans salaire. Comme elles seraient indignes de se plaindre de ce rôle qu’elles ont depuis que le monde est monde! Elles ne sont pas libres lorsqu’elles doivent négocier parce qu’elles gagnent moins que leur mari, pour le même travail. Elles ne sont pas libres parce que nous sommes encore dans un monde où les hommes sont au-dessus des femmes. Quand il y aura égalité des sexes et le même traitement pour chacun, on pourra dire que les femmes sont libres.

Certes, au Canada, les femmes sont quand même considérées comme libres : elles ont le droit de voter depuis 1940, de divorcer depuis 1969 et de se faire avorter même si ce droit, tout comme d’autres, ne devrait pas être tenu pour acquis. Ne devraient-elles pas se réjouir d’avoir fini par obtenir les mêmes droits que les hommes, de travailler, d’avoir un compte en banque, de pouvoir avoir une propriété ou de voter?

Or, les femmes prennent peu de décisions sans que ce soit monsieur qui ait le dernier mot, non? Que l’on parle maison, enfants, grosses dépenses, mode de vie et j’en passe. Les femmes vivent malgré elles dans un monde dominé et pensé par des hommes, qui ne désirent pas tant que cela qu’elles soient libres et égales à eux en tous points.

Vous me direz que le monde est ainsi fait et que c’est comme ça depuis la nuit des temps, que la femme appartient au sexe faible et l’homme au sexe fort et qu’on ne changera pas le monde. Pourquoi avons-nous, en tant que femmes, été considérées comme ayant moins de valeur que les hommes? Nous qui depuis l’âge de pierre avons mis au monde l’humanité, l’avons nourrie, soignée, aimée et avons supporté d’être fortes tout en étant considérées comme des enfants pendant des siècles.

Tantôt traitées comme des enfants, tantôt comme des esclaves, les femmes ont attendu longtemps pour obtenir la liberté qu’elles connaissent aujourd’hui. Elles attendront encore longtemps pour le reste. Une génération ne suffit jamais à changer les choses; il faudra plusieurs générations de femmes qui se tiennent debout pour dire que ça suffit et pour demander, exiger que ça change!

Vous sentez-vous libre? Qu’est-ce qu’être libre si cette liberté est conditionnelle?

Nous pensons être différents, nous avons bien une Charte des droits et libertés, nous avons des lois, nous sommes un peuple qui se perçoit comme éduqué et civilisé. Tout cela nous réconforte dans notre certitude d’être libres et de laisser les autres libres; nous sommes fiers de le penser et surtout rassurés. En vérité, si la femme québécoise était libre – je veux dire, libre pour vrai – elle ne serait plus enchaînée.

Non, vous avez raison, nous ne nous servons plus de chaînes : nous sommes une société civilisée. Les chaînes sont ailleurs maintenant. Elles sont dans la tête des femmes, dans leurs souliers « échasses », dans leurs seins refaits qui tiennent debout, dans leurs silences devant la bêtise des hommes, devant lesquels elles se savent impuissantes. Non, les femmes ne sont pas libres; elles sont comme des enfants assez grands pour jouer dehors, pour avoir de l’argent de poche et pour le dépenser.

Les femmes seront vraiment libres quand elles seront assez fortes pour ne pas avoir à lutter pour défendre ce qu’elles ont déjà, ou pour obtenir justice pour le reste.


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