Une meilleure version de lui-même (8 de 8) | Épilogue

14 décembre 2013Evelyne Papillon

Laisser Vincent n’a pas fait si mal que je le pensais. Le plus dur a été de prendre la décision. C’était un soulagement de m’être écoutée enfin. D’ailleurs, je sors seule, ce soir, sans attendre qui que ce soit.

Le Choco-Là me semble la destination idéale pour me gâter. J’ai apporté un carnet, histoire d’y coucher mes pensées entre les bouchées de mousse au chocolat. Un couple se nettoie les amygdales dans la vitrine. Je ne suis même pas agacée, je les trouve beaux à la limite.

Ça peut paraître un peu matante ou new age, mais j’ai le goût de faire de la visualisation positive sur mon avenir amoureux. Des fois, quand on sait vraiment ce qu’on veut, puis qu’on le confie à l’univers… Je vous entends me juger. Cessez là ce cynisme.

Alors le prochain devra être, euh… beau ? Non, pas trop beau, sinon on risque d’essayer constamment de me le piquer. Alors juste assez : un éclat dans l’œil, une fierté dans la posture, un sourire engageant, mais pas style vendeur de char, de grâce !

Fin ? Oui, c’est sûr, mais pas au point où il n’aime pas l’humour noir de temps en temps. Alors juste assez fin. Sensible, mais pas torturé non plus. Avec un passé semi-réglé, genre. Parce qu’on n’a quand même pas une DeLorean pour retourner dans le temps et que notre parcours contribue à la personne intéressante qu’on est devenue.

Intelligent ? Ah ça oui. Quelqu’un qui pourrait me deviner de temps à autre et compléter mes phrases, ça ferait changement. J’en ai marre de construire des ponts entre nous qui s’effondrent lamentablement comme à Montréal. Un peu de réciprocité, des fois !

Drôle ? Ça me plairait, quoique entre drôle et intelligent… Non, je pense que ça peut venir ensemble ou séparément, ces deux qualités. Je me demande à combien de qualités on a droit quand on fait vœu de partenaire idéal. Il y a sûrement une limite… L’univers aurait de la misère à recruter sinon.

Un gars qui me dirait comment il se sent, ce serait bien. Une espèce rare, qui saurait répondre à «  Est-ce que tu m’aimes ?  » quand j’ai une crise de confiance en moi ou en nous. Ou pire répondre à «  Pourquoi tu m’aimes ?  » sans empirer les choses.

Un mec conscientisé. Je suis tannée d’être celle qui capote à propos de tout. Ce serait bien s’inquiéter à deux des fois. J’aimerais quelqu’un qui se pose des questions à propos de l’environnement et qui a un mode de vie en conséquence.

Un homme ouvert d’esprit. Il ne sourcillerait pas en entendant mes albums de Philippe Katerine. Il ne bâillerait pas devant mes films sous-titrés. Il en saurait plus que moi, tiens. Quelqu’un qui me pousserait à me dépasser.

Le partenaire idéal aurait des amiEs. Parce que ça voudrait dire qu’il comprend minimalement les femmes et que je bénéficierais de ces connaissances. Et aussi parce que j’ai plein d’amIs. Il y a moins de jalousie quand chacun a des amitiés hommes-femmes de son côté, non ?

Vincent, c’était un flocon de neige : il était unique ! Mais il était unique… comme tout le monde. Et moi, je suis sûre que tôt ou tard, un autre flocon me tombera dessus. Ce n’est pas vrai qu’il n’y aura pas de saison des amours d’ici le printemps. Chaque flocon peut sembler magnifique sur le coup, puis devenir froid un jour. Mais j’ai envie de revivre la magie. L’excitation d’avant la première neige.

En attendant, je vais me farcir les fêtes de Noël seule. Je profiterai tranquillement de ma famille sans regarder l’heure, car je ne serai attendue nulle part après. J’aurai moins de cadeaux à faire. Lorsqu’on me demandera si j’ai un «  petit chum  », je dirai que je suis bien toute seule pour ne pas perdre la face et parce que c’est un peu vrai. Des fois, le plaisir de s’occuper de soi ou au contraire de se laisser aller, c’est suffisant.

Je ne suis l’objet ni d’amour ni de contrôle de qui que ce soit. Je ne suis l’objet ni de désir ni de pression de qui que ce soit. Je ne suis pas un cadeau. Je n’ai pas à en être un. Je n’ai personne à perdre et je ne me perds dans personne. Je n’ai pas à prouver aux autres que je suis digne d’être aimée ; je n’ai qu’à le savoir en moi. Et puis, on n’arrête pas de dire que c’est la santé qui compte, alors lâchez-moi avec le «  petit chum  » et… santé !


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