Cuba, quand socialisme ne rime plus avec solidarité

17 janvier 2016Fanie Lebrun

Le socialisme cubain est complexe, mais il illustre bien l’idée de base qu’est l’apport et le partage à l’ensemble de la société par le dévouement de l’individu. Bien qu’on ne puisse écarter les échanges économiques nécessitant une monnaie afin de permettre minimalement ceux-ci, la logique marchande n’en est pas le but.

Malgré de bonnes intentions, très louables, le socialisme a ses limites et si elles ne sont pas considérées, traitées avec diligence, cela risque fort bien de mettre en péril même le système socialiste et de glisser vers un capitalisme loin d’une solidarité réelle, soit « le sentiment qui pousse les hommes à s’offrir une aide mutuelle ».

Au terme d’un périple de 3 semaines en sac à dos à parcourir l’île du nord-ouest au sud-est, les conversations ont afflué et nourri les observations. À présent, je me demande comment cette solidarité, faite de sacrifice individuel au profit du collectif, subsistera.

Apport du socialisme à la communauté

La prémisse du socialisme repose sur la société avant l’individu. Avant tout un courant de pensée et de mouvances politiques, cela vise une organisation sociale et économique plus juste pour une égalité sociale ou du moins, réduire les inégalités sociales.

Cuba en représente un excellent exemple dû à sa Révolution, Hasta la victoria siempre ! En donnant un accès universel à l’éducation, à la santé et à la sécurité pour toute la population cubaine.

Cada vez que vamos a analizar, a evaluar, a repensar cómo en nuestro país se protegen los derechos de los ciudadanos, se atienden a estos y se salvaguarda lo que les resulta importante, siempre que remitirnos a los origines de la Revolución. [1]

Chaque fois que nous allons analyser, évaluer, repenser comment notre pays protège les droits des citoyens, en répondant à ces questions et en sauvegardant ce qui semble important, toujours nous nous en remettons aux origines de la Révolution.

Ainsi, sortie de l’esclavage pour se réapproprier ses ressources, Cuba s’est dotée d’un système de santé et d’éducation pour tous. Une propriété sociale du bien commun. Il est à noter que la consultation est gratuite, les médicaments non. Les cours sont gratuits, mais pas le matériel scolaire.

La Révolution a servi à changer les choses, mais comment pourra-t-elle se maintenir encore 20 ans ?

Système économique cubain

Le CUC a été introduit, en parallèle au peso local et valant 25 fois plus cher, pour permettre l’entrée de devises étrangères. Le CUC se veut aussi la monnaie des touristes. Bien que l’un et l’autre peuvent utiliser les deux monnaies (ex. touriste avec peso local échangé sur la rue.)

En 1995, le peso convertible cubain (CUC) a été introduit dans le but de convertir la devise étrangère (notamment le dollar américain dont la valeur est à parité) et d’encourager le commerce international et l’industrie touristique. [2]

Les gens ont des connaissances, mais des débouchés limités. Le pays connaît un taux de chômage peu élevé (à 3,6 % comp. Canada 7 %) [3], mais les salaires sont dérisoires.

Les limites du socialisme

Avec des salaires avoisinant les 8 CUC à 20 CUC par mois (soit 11,25 $ à 28,10 $ par mois), il est difficile de combler tous ses besoins. Il y a quelques années, les produits d’hygiène ont été retirés du carnet de rationnement, donc une dépense de plus qui s’ajoute à des fonds déjà restreints. Ce qui pourrait justifier qu’un médecin choisisse de faire des massages à l’hôtel à 10 CUC la séance plutôt que de travailler à 30 CUC/mois.

Cuba transige avec des gouvernements aux valeurs similaires, comme la Chine. Et le Venezuela dont les échanges sont en importations de pétrole et les exportations en médecins. Ce qui les sort d’un certain isolement.

L’avenir de la solidarité en péril

Comment tous ces changements à venir et souhaitables vont-ils nourrir la population ? Comment les Cubains vont devoir développer la mentalité capitaliste ? Perdront-ils au change avec plus de matériel et moins de solidarité humaine ? Cette force qui les caractérise prendra-t-elle le bord ?

Au gré de ce périple, en délaissant la plage au profit de rencontres humaines impressionnantes, cela a aiguisé le regard sur les affres possibles du capitalisme qui s’installera tranquillement mais sûrement, forgeant ainsi un questionnement sur l’avenir des Cubains.

Est-ce que l’arrivée d’Internet et des Américains aura raison de cette victoire ? Plusieurs sont enthousiastes face à l’avenir de l’accès au pays pour lever le voile sur ce qui se passe. D’autres craignent la venue des armes et de la violence comme au Costa Rica et en Argentine. À suivre.

[1] Granma, quotidien du Parti communiste cubain (PCC), édition papier du 10 décembre 2015. Tire aussi son nom du yacht qui servit à lancer la Révolution cubaine en 1956.

[2] http : //bit.ly/el-190-2.

[3] http : //bit.ly/el-190-3.


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