Le Mont Bellevue: une future réserve naturelle et son complexe pétrolier?

22 mai 2018Marie-France Lanoue

Le Mont Bellevue, qui constitue le plus vaste parc naturel de la ville de Sherbrooke, verra l’une de ses entrées principales, rue Dunant, flanquée d’un complexe pétrolier (station-service) destiné à recevoir un haut volume d’achalandage doublé de deux chaînes de restauration rapide ; une Planète Poutine et une Planète Polaire. Bientôt, les adeptes d’activités de plein air au Mont Bellevue pourront vivre l’expérience de « nature-urbaine » — pour reprendre l’expression de Destination Sherbrooke — à son paroxysme ! Quoi de mieux en effet, après un effort physique dans un paysage enchanteur, que de respirer les émanations d’essence causées par l’affluence des véhicules à proximité des lieux ? Et ce n’est pas tout ! Évidemment, il faut aussi penser à bien s’alimenter. C’est pourquoi une bonne dose de gras-trans, chez Planète Poutine, vous permettra de refaire le plein d’énergie… Ça ne vous donne pas envie ? Pourtant, c’est dans l’ère du temps, voyons, que d’augmenter notre consommation d’essence et de se nourrir de malbouffe !

Trêve de sarcasme… c’est la colère qui parle, il faut m’excuser. Sincèrement, vous savez, j’ai honte. Honte de ma ville qui, de plus en plus, devient celle des promoteurs et des gens d’affaires plutôt que celle des citoyens. Honte, aussi, du fait que les élus concernés ont toujours nié leur responsabilité dans ce dossier, se bornant à répéter que le promoteur, Luc Élias, était dans son « plein droit » de faire de « son » terrain ce qu’il voulait bien en faire.

Le Mont Bellevue, c’est un petit joyau sur le territoire de la ville de Sherbrooke. Tellement, que l’Université de Sherbrooke souhaite faire reconnaître le parc comme réserve naturelle en vertu de la Loi sur la conservation du patrimoine naturel ! Et tandis que cet axe stratégique du coin Dunant et Thibault aurait pu servir au développement d’une véritable vision d’avenir — c’est-àdire, entre autre, en tenant compte des politiques de développement durable —, ce n’est malheureusement pas ce que l’on voit à l’oeuvre aujourd’hui. Présentement, dans ce secteur de la ville, et dans un rayon d’à peine 1,5 km, on retrouve déjà 3 stations-service ; et tout semble être en place pour que l’on en compte bientôt une quatrième. Pour moi, et pour plusieurs, l’idée d’une station-service à proximité de la montagne va à l’encontre de ce qu’on appelle le gros bon sens. Car, soyons francs, le projet d’un complexe pétrolier, à cet endroit précis, ne tient compte ni du fait qu’il se situe en pleine zone résidentielle, ni du fait qu’il fait face à un massif naturel de 200 hectares. Et malgré tout, je persiste à penser qu’on peut encore faire quelque chose et ce, en dépit de ce que nous dit le maire de la ville, Steve Lussier.

Le terrain dédié à recevoir la station-service et les chaînes de restauration rapide, au coin des rues Dunant et Thibault, est présentement en attente de franchisés, c’est-à-dire de gens qui vont vouloir participer à cette vision rétrograde et capitaliste de la ville de Sherbrooke. Alors je m’adresse à vous, sherbrookois et sherbrookoises, parce que si vous aimez cette ville pour les mêmes raisons que moi — pour ses paysages à couper le souffle et pour la chaleur des gens qui l’habitent — je suppose que la situation doit vous indigner aussi. C’est pourquoi je vous invite à utiliser le seul pouvoir citoyen qu’il nous reste en ce moment, l’arme ultime du consommateur : le boycott. S’il faut parler le langage de l’argent pour se faire entendre (puisque les voix de la raison n’ont pas donné grand-chose jusqu’à présent), je vais aller jusque là. J’en appel à la solidarité citoyenne et je suggère que l’on boycotte, collectivement, cette future station-service et tout ce qui pourrait s’y installer et qui ne correspond pas aux valeurs ainsi qu’aux besoins des sherbrookois. Je vous invite aussi à jaser, haut et fort, de ce qui se passe sur notre territoire. Me semble qu’il est temps de se réapproprier notre ville. Parlez-en en famille, entre amis, entre collègues. Et à vos invités, qui viendront vous visiter et qui sortiront sur Dunant via la 410, suggérez- leur de rouler 30 secondes de plus pour faire le plein. Ouain. 30 secondes. Juste en bas de la rue Dunant, il y une belle station-service qui roule à fond et un petit café de quartier sympa qui les attendent.


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