Surface et profondeurs du Québec

17 septembre 2021Sébastien Doyon

Quand je pense à l’indépendance, je pense à Falardeau. Dans les deux cas, ils gagnent à être mieux connus, voire redécouverts. Cet article est une invitation à rouvrir les pages de notre culture et notre histoire.

Falardeau

Il y a quelques années, je suis tombé par hasard sur un texte de Pierre Falardeau (1946-2009). J’y ai découvert quelque chose comme un grand québécois, un cinéaste libre, un gars qui inspire, mais surtout un gars capable de nous brasser le pommier. J’ai été surpris en lisant Les bœufs sont lent mais la terre est patiente (1999). Surpris, car sans trop savoir pourquoi, j’avais déjà imprimé dans mon esprit l’image d’un gars qui gueule tout le temps après toute, un gars mal engueulé en fait, outrancier, quelqu’un d’assez pénible à côtoyer.

Mais je me suis rappelé qu’à l’exception de deux ou trois extraits d’entrevues de lui en train de parler (ou de sacrer), et de quelques jokes d’Elvis Gratton, je ne connaissais pas grand-chose de lui en fait. Pas grand-chose, il me semble, pour avoir une telle idée préconçue.

À la surface du Québec

Et bien le Québec, c’est un peu comme Falardeau des fois ! L’image qu’on s’en fait, qui circule dans l’air du temps, nous brosse le portrait d’un petit peuple qui avance un peu de travers, suiveux, voire même bourreau ; certaines situations gonflées jusqu’à devenir scandales égratignent les modernes que nous sommes, et voilà notre idée faite. Oubliant de se demander si une opinion publique ne pourrait pas être manufacturée ? L’on se rappelle Noam Chomsky, nous expliquant qu’un appareil médiatique efficace parvient à manufacturer le consentement politique d’un peuple. Il semble en effet que le bruit médiatique ambiant nous prescrit une sorte de prêt-à-penser, qui se répercute en préjugés parfois bêtement intériorisés : « ce qu’il a fait est sans doute déplorable ».

Dans les profondeurs

En ouvrant les pages d’un de ses livres, j’ai découvert chez Falardeau un gars qui parle du jour où l’île d’Anticosti a été vendue, du financement dans les universités et de paysages qui serrent le cœur. Il nous parle aussi des tireux de ficelle, de culture, de ses grandes amitiés, et bien d’autres.

Au bout du compte, qu’on soit d’accord ou non avec Falardeau, en le lisant on apprend.

C’est un peu comme ça avec le Québec. La trace qu’il inscrit dans le monde, sa culture, son art et son histoire méritent que l’on s’y arrête en profondeur ; qu’on tourne les pages de ses livres et qu’on dépasse les idées préconçues.

Aller au cœur du Québec, c’est rencontrer un peuple qui se bat depuis le début pour continuer d’exister.

De quoi le Québec est-il vraiment fait ?

L’indépendance est la stature d’un peuple

L’on y découvre un peuple qui s’est sans cesse accroché à la vie, malgré la dureté des hivers et la maladie; qui a vu fleurir sa culture en dépit du destin annoncé par un certain Lord Durham; un peuple qui a conservé sa gaieté de cœur et qui s’est réinventé chaque fois qu’on lui dérobait quelque chose – son hymne national, son passé, jusqu’à son propre nom.

Aller au cœur du Québec, c’est rencontrer un peuple qui se bat depuis le début pour continuer d’exister. Et s’il veut poursuivre son existence dans le temps, il doit pouvoir s’appartenir et penser par lui-même. Comme celui qui quitte son état de tutelle devient souverain et autonome chez Kant; le Québec doit être en mesure de se projeter en tant qu’entité propre.

Authenticité

Des enseignements que je tire de Falardeau, l’authenticité est le plus fondamental. Tant qu’à exister, j’essaie d’être là en entier ; avec mes erreurs, mes bons coups, mon passé, et tout ce que je peux en tirer pour m’améliorer. Tout ce qui me rend unique. Je pense que cette posture serait légitime aussi pour notre peuple. Et vous savez quoi ? Plus je m’assume, plus je suis conscient de mon existence propre et de ma liberté d’agir. Et plus je suis heureux.

Si ce sentiment peut être partagé à l’ensemble d’un pays, et bien moi je dis « oui » !


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