Vos promesses et les nôtres

22 septembre 2022Jean-Philippe Benjamin, Rosalie Dupont et TACAE
Catégorie : Société

À la Table d’Action Contre l’Appauvrissement de l’Estrie, comme dans bien d’autres groupes communautaires, on s’époumone à l’année longue et depuis des décennies pour attirer l’attention des personnes élues sur nos enjeux. 

Nous les avons donc à l’œil pendant une campagne électorale: est-ce que nos cris du cœur vont finalement être entendus ? Est-ce que nos analyses et nos argumentaires, rigoureux et fiables, auront réussi à attirer leur attention ? Est-ce que, enfin, on aura nous aussi droit à des engagements à la hauteur des besoins de la population la plus appauvrie du Québec ?

On doit se rendre à l’évidence, encore une fois, que ce n’est malheureusement pas le cas. La pauvreté, c’est souvent un sujet qui n’a pas la cote. Politiquement, médiatiquement et socialement, il est bien plus facile de rejeter le blâme de la pauvreté sur les pauvres que de reconnaitre que notre société est fondamentalement inégalitaire et que c’est notre système économique qui la crée et l’entretien, cette pauvreté. 

Les promesses de millions pleuvent, mais on ne fait que parler de « patcher le bobo », encore et encore. Pratiquement aucune mesure réellement structurante n’a été avancée. On entend souvent que lutter contre la pauvreté, ça coûte cher, qu’on a des limites financières au Québec et qu’on ne peut pas tout faire, qu’il faut faire des choix. Pourtant, si la lutte contre la pauvreté coûte cher, le fait de la tolérer et même de la maintenir nous coûte bien plus cher encore !

La pauvreté, ça nous coûte la palette : ça coûte cher au système de santé, ça coûte cher au système d’éducation, ça coûte cher en système carcéral, et la liste des dépenses qui lui sont imputables est plus longue encore.

Les personnes en situation de pauvreté ont une espérance de vie en bonne santé 10 % plus basse que les autres, leur taux de suicide est deux fois plus élevé et elles sont plus souvent incarcérées. Leurs enfants ont davantage de problèmes de santé dès la naissance, ont 2 fois plus de chances de décrocher de l’école, et par conséquent de vivre en situation de précarité perpétuant ainsi un cercle vicieux. 

Si le drame humain vous indiffère et que vous vous targuez d’être pragmatique et ne pensez qu’à l’économie, il y a un chiffre qui ne peut être négligé : 17 milliards. C’est ce que coûte la pauvreté pour le Québec seulement. Ce montant remonte à 2008 et il est clair que l’on paie aujourd’hui bien davantage tout en continuant de faire le même choix : on aime ben mieux laisser du monde vivre dans la pauvreté que de questionner nos illusions de croissance infinie, de ruissellement de la richesse et du fameux « si tu veux tu peux ».

Si maintenir les gens dans la misère est un choix politique, il n’en revient qu’à nous de faire un choix différent. 

On a posé des questions aux personnes candidates de l’Estrie durant la campagne. Leurs réponses seront diffusées en ligne à partir du 20 septembre sous forme de vidéos, mais leurs réponses ont tendance à nous laisser sur notre faim. Pour leur donner un coup de pouce, comme elles tiennent tant à plaire durant ces quelques semaines de campagne, la TACAE tient à leur donner une recette gagnante pour lutter contre la pauvreté au Québec. Engagez-vous, dès maintenant, à :

Augmenter toutes les prestations de protection publiques au moins à la hauteur de la mesure du panier de consommation pour permettre à TOUT LE MONDE de couvrir ses besoins de base.

Augmenter dès maintenant le salaire minimum afin qu’une personne qui travaille à temps plein sorte de la pauvreté. Ce montant a été établi à 18 $ de l’heure pour 2021. 

Assurer l’accès universel et gratuit aux soins dentaires et aux soins des yeux à toute la population du Québec en en faisant un service public, au même titre que tous les autres services de santé.

Assurer le respect plein et entier des droits humains de chaque individu au Québec, entre autres en investissant massivement dans le transport collectif, dans la construction de logements sociaux et dans le filet social. 

À trop ignorer la détresse, les personnes au pouvoir, quelles qu’elles soient, devront faire face à des mobilisations populaires et à des mouvements sociaux plus engagés que jamais. Notre mobilisation politique ne passe pas uniquement par les urnes et, sans engagements clairs de la part des personnes au pouvoir, le milieu communautaire est prêt à faire la promesse suivante : nous lutterons pour que la justice sociale devienne une réalité dans nos communautés.  


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