Un colis d’espoir pour Alep

13 mars 2023Benoit Viel
Catégories : Mobilisation , Société

Le 6 février dernier, un tremblement de terre meurtrier a secoué la région frontalière de Gaziantep en Turquie et d’Alep en Syrie. On estime actuellement les morts à au moins 50 000.

Des levées de fonds ont été organisées dans plusieurs villes canadiennes. Entrée Libre a rencontré Monsieur Joy Korji, responsable de la levée de fonds à Sherbrooke, dans le sous-sol de l’église Saint-Ephrem. Quelques heures plus tôt, des dizaines de boîtes de dons s’y entassaient à l’intention des Syriens éprouvés par la catastrophe naturelle. Ces boîtes sont maintenant à destination de la Syrie.

Entrée Libre : Monsieur Korji, quel est votre état d’esprit à ce moment-ci ? Est-ce que vous avez de la famille touchée ?

Joy Korji : Je suis d’avis que tous les Syriens ici au Canada et ailleurs dans le monde se sont sentis impuissants face à la tragédie. C’est donc pour ça que nous avons pris l’initiative de lever une collecte de dons. Et après deux semaines, je peux dire que je suis surpris par la réponse. Je m’attendais à ce que le tout demeure entre nous avec mes collègues de travail, quelques étudiants de l’Université Bishops et le personnel de l’Église. Finalement, nous étions par dizaines à aider et nous avons rempli plus de 200 boîtes de dons. Les gens de Sherbrooke ont été très généreux et nous avons senti que nous avons été entendus de tous et toutes. Il y avait des jours où nous étions une vingtaine dans le sous-sol de l’Église alors que je ne connaissais pas la moitié d’entre eux. Ça me touche énormément. […]

J’ai effectivement deux frères, des cousins.es et des tantes qui ont été touchés. Mon frère a dû quitter sa maison parce qu’elle n’est plus sécuritaire. 

E.L. : Est-ce que l’aide fournie sur le terrain est adéquate et est-ce que la population peut y accéder facilement ?

J.K. : Les dons en argent peuvent être envoyés aujourd’hui et reçus le lendemain. Les ONG sont sur le terrain et s’en occupent. Cependant, il n’y a pas suffisamment d’aide qui se rend sur place à Alep par exemple, en raison des problèmes de nature politique.

E.L. : La Syrie est déjà éprouvée par 12 ans de guerre civile. Savez-vous si le tremblement de terre a donné lieu à une trêve sur le terrain ?

J.K. : À ce moment-ci, les combats ont essentiellement pris fin à Alep. Par contre, l’économie et les services aux Syriens ont été gravement affectés et la situation était déjà extrêmement difficile depuis le début de la guerre. Pour plusieurs, il n’y a plus d’eau courante ni d’électricité.

E.L. : Est-ce que les sanctions internationales en place depuis 2011 devraient être diminuées pour permettre à l’aide humanitaire d’être distribuée ?

J.K. : Quand le tremblement de terre a frappé, j’ai lancé une campagne de sociofinancement pour permettre aux gens de la région de donner sans avoir à se déplacer et ma campagne a été censurée par la plateforme en raison des sanctions et de la mention de la Syrie. C’est un exemple parmi d’autres des raisons pour lesquelles les sanctions internationales causent du tort aux Syriens. 

Heureusement que le gouvernement américain a suspendu les sanctions. […] Et c’est encore ardu : nous devons prouver nos intentions humanitaires pour que les plateformes, par la suite, autorisent la campagne.

E.L. : Selon vous, quels sont les plus grands défis des Syriens, en ce moment ? 

J.K. : À court terme, c’est de transporter sur le terrain la nourriture et les biens de première nécessité. Les hôpitaux sont incapables de fournir des soins aussi simples que des points de suture sans d’abord leur fournir l’aiguille et le fil. Les médicaments manquent grandement, aussi. On doit également ouvrir les églises et les mosquées pour les habitants. […]

À long terme, c’est la reconstruction qui importe. Mais ce travail, ça me dépasse. Ce n’est pas un travail ni pour moi ni pour l’Église. Le tissu social est déchiré. Ça sera un travail à grande échelle pour redonner aux Syriens leur chez-soi, reconstruire leurs maisons et tous les Syriens vont devoir mettre l’épaule à la roue. 

E.L. : Y a-t-il un message que vous aimeriez faire entendre aux Sherbrookois.es à ce moment-ci ?

J.K. : Je veux remercier les Sherbrookois.es pour leur implication, leurs dons et leur gentillesse. […] Les gens qui ont donné l’ont fait de façon désintéressée et enthousiaste, comme si c’était pour leur propre pays. C’était vraiment apprécié.

Au moment d’écrire ces lignes, Monsieur Korji est à la recherche de partenaires pour le transport des dons de Montréal jusqu’à destination, vu le volume des dons recueillis. Si vous avez des contacts ou connaissances dans le milieu du transport, vous seriez des plus aimables de nous les communiquer pour que nous puissions les relayer.


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