Hubert Richard, l’envers du lycra vert

Date : 4 novembre 2014
| Chroniqueur.es : Sylvain Vigier
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Chaque localité à ses personnages. Sherbrooke voit régulièrement apparaitre à la saison des élections un être étrange vêtu de vert qui clame dans son mégaphone son envie d’un transport en commun gratuit : Hubert Richard. Le vivre ensemble, c’est peut-être avant tout connaitre les personnages de sa cité. Au-delà des apparences, verbatim d’une rencontre au dépanneur Comme Une Eau terre.

Etat Civil ?

Hubert (Vincent) Richard, marié, 4 enfants. Je suis né à Montréal et je vis à Sherbrooke depuis mon primaire.

Les raisons de votre boulimie de candidatures aux élections ?

La boulimie ? La chose incontournable pour que la politique fonctionne, c’est de s’y intéresser. La politique doit être populaire et non élitiste. Les élections sont une grande porte ouverte pour s’exprimer. Je le fait depuis mon implication dans les associations étudiantes au secondaire jusqu’à ma candidature aujourd’hui à la présidence de la commission scolaire. Ma première campagne au municipal (1998) portait sur la mondialisation, à l’époque des accords de l’OMC. Je voulais montrer l’engrenage de la libéralisation et la perte des rapports humains. Je trouvais que l’on manquait d’une approche humaine et conviviale, qu’il est nécessaire que l’on retrouve si l’on veut aboutir à un certain équilibre par rapport aux pouvoirs gigantesques que sont en train d’avoir ceux qui ont plein d’argent et les multinationales.

Qu’est-ce que « Comme Une Eau Terre » ?

Un parti est un très bon véhicule pour des idées. Il revient à chaque élection, il peut lever des fonds pour faire campagne. J’ai compris cela lors des élections au provincial où Québec Solidaire réussissait à obtenir un appui auprès des électeurs même si le candidat n’était pas connu. Ca prend ce véhicule là pour prendre sa place dans le monde municipal. Le Renouveau Sherbrookois en est arrivé à la même conclusion.

Je crois profondément que c’est localement que l’on va réussir à avoir une vision. C’est la seule façon, à mon avis, que l’on peut en arriver à se faire assez confiance pour avoir une certaine autodétermination face aux problématiques du développement durable. Le jour où une collectivité aura réussi ca, elle deviendra un peu un exemple pour d’autres. C’est ca aussi l’idée de Comme Une Eau Terre : ca se veut un peu comme un parti universel. L’idée c’est d’essaimer des Comme Une Eau Terre à travers le monde : c’est pas provincial, c’est pas fédéral, c’est d’abord ici !

Bonnes récoltes pour le jardin de communauté que vous avez semé sur la rue King ?

C’est une réalisation qui se fait sans budget. Moi j’ai un dépanneur et c’est très difficile cette année pour nous. Mais c’est important pour moi de continuer ce petit emplacement là, que l’on avait développé l’année passée. On avait réussi à avoir un usufruit du propriétaire l’an passé mais cette année il est arrivé à échéance. J’ai contacté la marie pour savoir si elle avait des visées sur ce terrain là, ça m’a été répondu qu’il était envisagé de mettre un banc public.

Je me perçois plus comme un jardinier urbain que comme un organisateur de jardins collectifs. J’ai un plaisir que j’aimerai partager avec d’autres : c’est celui de faire pousser des légumes en ville. J’ai 4 enfants, j’ai un dépanneur, j’ai un parti. Pis, le peu de temps que je peux avoir j’aime le consacrer à ces jardins. Moi mon plaisir, c’est que les légumes poussent, je ne les fait pas pousser pour exclusivement que j’en mange. Ce que je souhaite c’est que les gens s’approprient les légumes qui y poussent. Cette année, il y a un itinérant qui a découvert ces plans de tomates au milieu de la rue. Et chaque fin de journée il s’occupait des tomates, il les plaçait, les désherbait, pis ça lui faisait du bien.

Votre mesure emblématique c’est l’accès au transport gratuit. Quel sont les enjeux de cette proposition ?

C’est incontournable ! Si l’on regarde ca froidement, « rendre gratuit le transport en commun », c’est de se mettre d’accord collectivement pour financer ce transport là pour qu’il soit le plus cool possible à prendre. Si on ne veut pas faire ça, alors à mon avis c’est qu’on ne veut pas vraiment faire le développement durable parce que le transport gratuit c’est l’expression même du développement durable.

Le développement durable c’est : l’économie, le social, et l’environnement. Le transport en commun gratuit répond à une mesure sociale : tu aides les personnes pauvres en leur enlevant une facture qui leur assure une mobilité. Il y a bien des personnes qui se privent du transport en commun parce qu’elles n’ont pas les moyens. Au Québec, nous n’avons pas d’industrie automobile (seulement des sous-traitants), on a des compagnies qui construisent des autobus. Au niveau économique ca serait gagnant. Même si tu ne produits pas tes autobus. La STS chiffre à 30M$ la gratuité du transport. Mais cet argent représente un investissement local : c’est des chauffeurs d’autobus, ce sont des personnes qui viennent plus facilement au centre-ville ou dans d’autres places de Sherbrooke. Au niveau environnemental, le char est tellement l’fun avec toutes les publicités que l’on met dessus. On peut-tu se donner les moyens de compétitioner ca ? La gratuité du transport en commun, c’est d’avoir un coté attractif supplémentaire pour prendre l’autobus. Y’a pas meilleur plan marketing que la gratuité pour rendre le transport en commun attractif face à la liberté que représente la voiture. Si on refuse ca, on veut faire quoi ? On veut faire du développement durable ? On va le faire tout croche ! Il faut se commettre. Quelque part ca devient sérieux, c’est un engagement là tsé. Le transport gratuit c’est également un moyen, un moyen pour s’entendre vers quoi on veut aller. Parce que le développement durable, c’est très stimulant !

Le vivre ensemble, ca représente quoi pour vous ?

Vivre ensemble… ? C’est le contraire de vivre séparé. Dans une ville les gens ont tendance de vivre séparé des uns des autres. C’est le défi des villes : apprendre à vivre ensemble. C’est pas facile là. Faire des jardins ca peut aider, rendre le transport en commun gratuit… Mais ce qui est l’fun la dedans, c’est que chacun s’inclus : le pauvre, il sent que le riche le respecte parce qu’il se met d’accord pour ca [la gratuité du transport]. Ca murit collectivement, et le mot collectif prend son sens. Lorsque le transport en commun devient gratuit, il devient aussi celui des plus riches, il n’exclut donc plus les plus pauvres, il devient un service public.

Trois choses que vous n’aimez pas à Sherbrooke ?

(long silence)

Alors question suivante : trois choses que vous aimez à Sherbrooke ?

C’est une super ville. On a une des rares ville située dans une vallée des montagnes Appalaches. On n’est pas dans les hautes montagnes comme à Sutton, mais c’est très vallonné, c’est très beau. On a la chance d’avoir eu des gens qui se sont souciés d’avoir eu des arbres dans la ville. C’est aussi une ville qui a deux superbes rivières qui la traverse.

C’est aussi une ville pauvre. Et en tant que ville pauvre moi j’aime ça, parce que tout est à faire.

Hubert Richard, c’est Super Hubert ou Robin des bois ?

Robin des bois, il volait aux riches pour donner aux pauvres… Super Hubert ca voudrait dire que j’ai un super pouvoir, et j’ai pas de super pouvoir.

Mon habit vert était là juste pour arriver à briser la glace. Je m’étais donné comme plan de campagne de faire des annonces en plein King/Wellington. Puis on a commencé à rire de moi avec mon côté humoristique et les vaches sur mes affiches qu’ils ne comprenaient pas. Alors je pensais arriver là, déguisé en vache mais c’était pas à mon gout. Pis quand je suis tombé sur le costume, ca a été un adon, je trouvais que ca prenait sa place. C’était voyant dans la rue, ca permettait d’interpeler, ca donnait de l’espace.

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