LA CONVENTION CITOYENNE POUR LE CLIMAT : une méthode et des conclusions qui offrent des perspectives

Date : 1 octobre 2020
| Chroniqueur.es : Sylvain Vigier
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LES ENJEUX DU RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE ONT GAGNÉ LA BATAILLE DE L’OPINION MAIS DE NOMBREUX BLOCAGES IDÉOLOGIQUES, POLITIQUES ET ÉLECTORAUX SUBSISTENT DU CÔTÉ DES DÉCIDEURS PUBLICS. UNE TENTATIVE POUR FAIRE SAUTER CES VERROUS EST ACTUELLEMENT EXPÉRIMENTÉE EN FRANCE ET DEVRAIT NOUS INSPIRER TANT DANS SA FORME QUE DANS SES RÉALISATIONS : LA CONVENTION CITOYENNE POUR LE CLIMAT.

La Convention

Cette initiative est à mettre au crédit du président français Emmanuel Macron à la suite des manifestations des « gilets jaunes » qui revendiquaient plus de démocratie directe et une transition écologique qui ne se fasse pas au détriment des plus pauvres. Pour répondre à l’enjeu environnemental en dehors de toute posture politique, 150 citoyens et citoyennes représentatifs de la population française (âge, formation, lieu et niveau de vie) ont été tirés au sort. Leur sélection ne demandait aucune pré-inscription au préalable, afin d’enlever tout biais de surreprésentation de personnes militantes et de sous-représentation de personnes plus indifférentes à l’environnement ou à la chose publique. Le mandat confié à la Convention était à la fois ambitieux et tout à fait clair : « définir une série de mesures permettant d’atteindre une baisse d’au moins 40 % (par rapport à 1990) des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030, dans un esprit de justice sociale ». Le président de la République s’est de son côté engagé à ce que les propositions de la Convention soient soumises « sans filtre » au parlement ou à référendum. Pour réaliser leur mandat, les membres de la convention se sont réunis à 7 reprises durant 3 jours. Un « socle d’information initial » leur a été fourni au début des rencontres de la convention. Des scientifiques, institutions publiques, entreprises et organisations non gouvernementales leur ont présenté leurs données et leurs enjeux. Ces documents et interventions sont accessibles en ligne.

Réflexion et propositions

Les membres de la convention ont travaillé autour de 7 grandes thématiques qu’ils ont jugé pertinentes et essentielles de traiter pour répondre aux enjeux de réduction de GES dans un esprit de justice sociale : « Consommer »; « Se déplacer »; « Se loger »; « Se nourrir »; « Produire et travailler »; « Constitution et gouvernance »; « Financement de la transition ». Là où le travail des élus et des professionnels de la politique peut se retrouver détruit par simple calcul politique, la réflexion et les décisions des membres de la convention se sont faites dans l’écoute et la bienveillance des opinions et des points de vue comme ils l’indiquent dans leur rapport final : « nous avons appris à être plus attentifs et plus tolérants aux avis de chacun dans le respect de notre diversité. Nous avons travaillé intensément, avec conviction, envie et un sentiment d’urgence face au climat pour parvenir à des propositions communes ». On aimerait que les débats entre élu.es se concluent ainsi.

Conclusions?

La convention a rédigé 149 propositions, approuvées par 95 % des membres. Ces propositions sont extrêmement ambitieuses (voir encadré) et leurs impacts sur les émissions de GES sont évalués. La suite du processus est maintenant entre les mains du gouvernement et du parlement français. Déjà, le président de la République a décidé d’écarter 3 propositions des 149 (modification de la constitution; la limitation de la vitesse sur autoroutes; taxe sur les dividendes) malgré la promesse d’une transmission « sans filtre ». Un projet de loi devra, suivant le calendrier initial, être déposé au début 2021 pour les 146 propositions restantes. Cependant, le processus de la convention citoyenne reste extrêmement positif. Sans personnes élues ou ayant un mandat à défendre, il a permis aux membres de la convention de s’affranchir d’un nombre important de blocages politiques sur l’environnement. Ils ont ainsi regardé droit dans les yeux les causes et conséquences des changements climatiques et ont agi en conséquence, on a même envie de dire: en adultes. Il serait bienvenu de mettre en place un processus similaire dans tous les paliers de décision – fédéral, provincial et municipal – car il démontre que collectivement nous pouvons sortir par le haut des enjeux de la crise climatique.

PROPOSITIONS MARQUANTES DE LA CONVENTION CITOYENNE POUR LE CLIMAT
Thématique consommer :
• Créer une obligation d’affichage de l’impact carbone des produits et services
• Réguler la publicité pour réduire les incitations à la surconsommation

Thématique produire et travailler :
• Favoriser une production plus responsable, développer les filières de réparation, de recyclage et de gestion des déchets
• Ajouter un bilan carbone dans le bilan comptable de toutes les structures qui doivent produire un bilan
• Mieux prendre en compte les émissions gaz à effet de serre liées aux importations dans les politiques européennes

Thématique se déplacer :
• Réduire la circulation des poids lourds (camions) sur de longues distances, en permettant un report modal vers le ferroviaire ou le fluvial
• Inclure des citoyens dans la gouvernance des mobilités au niveau local comme au niveau national
• Limiter les effets néfastes du transport aérien

Thématique se loger :
• Rendre obligatoire la rénovation énergétique globale des bâtiments d’ici 2040
• Lutter contre l’artificialisation des sols et l’étalement urbain en rendant attractive la vie dans les villes et les villages

Thématique se nourrir :
• Développer les pratiques agroécologiques et réformer l’enseignement et la formation agricole

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