Jour de la Terre – Lettre à l’humain

Date : 19 avril 2021
| Chroniqueur.es : Fanie Lebrun
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En cette journée du 22 avril – jour de la Terre – je vous adresse ces mots en mon nom, la Terre, globe terrestre jonchant le bureau des érudits, parcouru par les voyageurs avides de sensations. Voilà 3 millions d’années que l’Humain est sur terre comparativement à 200 millions d’années pour les fourmis et 3 milliards d’années pour les cyanobactéries (à l’origine de l’oxygène que vous respirez). Produit millénaire, arrivés au terme d’une succession d’adaptation, vous êtes fait d’évolution. Voyez la fascinante histoire de l’œil avec la démonstration de Neil deGrasse Tyson dans Cosmos.

Saviez-vous qu’une fourmi qui reçoit une information l’a juge en fonction de sa qualité et de ce qu’elle transmet et non selon le rang de sa source ? Un discernement utile.

Parlant d’information

J’ai entendu dire que vous étiez au sommet de la chaîne alimentaire. Est-ce vraiment une position enviable ? Ne vient-elle pas avec un niveau de responsabilité ? Auriez-vous atteint le sommet du statu quo, confortable dans l’indifférence, avec un déni du consommateur-destructeur ?

En 1970, le Jour du Dépassement, date à laquelle l’humanité vit « à crédit », c’était le 29 décembre donc un mode de vie presque « durable ». En 2020, c’était le 22 août. L’humanité utilisa 60 % de ressources en plus que ce qui peut être renouvelé, soit 1,6 terre.1

Un jour vous ne pourrez plus plonger la tête dans le sable parce qu’il n’en restera plus, épuisé avec assiduité. Le sable est la deuxième ressource la plus utilisée sur Terre après l’eau. Avec 40 milliards de tonnes extraits chaque année (9 fois plus que le pétrole). 2

Un chien pourrait-il uriner dans son bol d’eau, s’en prendre à sa niche, déféquer dedans et la mettre en pièce avant débarquer chez le voisin…en aboyant pour en avoir une autre… pour répéter le même manège ?

Vos choix, vos problèmes

Bouger les plaques tectoniques, c’est mon petit plaisir à moi. Peu importe les choix que vous faites, je vais m’en remettre ! Avec mes milliards d’années derrière la cravate et presque tout autant à venir, mais vous ? L’eau que vous buvez date de l’époque de ma naissance ou sinon, avant la formation de mon atmosphère avec l’arrivée des comètes et météorites. Ce que vous avez présentement, c’est tout ce que vous avez, c’est tout ce que vous aurez. Que vous déversiez des litres de polluants ou non.

Si vous traitiez l’eau de votre résidence en circuit fermé y mettriez-vous les mêmes produits ? Si ce sont les industries qui polluent, qui achètent leurs T-shirt et sous-vêtements ? Où vont leurs rejets de blanchiment et coloration ? Que ce soit à l’usine textile ou ailleurs, c’est la même chose à l’échelle de la planète. Sachez que vous buvez l’eau des dinosaures. Pas certaine que ceux-ci boiraient la vôtre, même si vous êtes bien intelligents.

Saturer les sols de pesticides et engrais, faute de revoir les méthodes de cultures, c’est votre choix. Mais pourquoi viser autant le rendement s’il y a tant de gaspillage ? Selon un rapport de l’ONU, chaque année dans le monde près d’un milliard de tonnes de nourriture sont gaspillées, soit près de 20 % des aliments disponibles pour les habitants du globe. En nourriture gaspillé, on y verrait sept fois le tour de la Terre de camions de 40 tonnes mis bout à bout.3

Il ne faudrait pas pousser la naïveté à penser qu’il n’y aucun effet à la surconsommation. Pourquoi ne pas s’initier à la collapsologie de Pablo Servigne et Raphaël Stevens avec Comment tout peut s’effondrer. Petit manuel de collapsologie à l’usage des générations présentes. Sinon quels effondrements seriez-vous prêts à affronter; Financier ? Commercial ? Politique ? Social ? Ou culturel ?!

Tant de pouvoir entre vos mains

À force que s’envole des tonnes de CO2 cela chauffe bien les dérèglements climatiques. Pouvant même changer les courants océaniques comme le Gulf Stream qui normalement réchauffe l’Europe. On ne parle pas ici de Nostradamus mais de milliers de scientifiques (qui ne peuvent pas TOUS participer sciemment à un complot mondial) et de citoyens du monde qui le subissent. Prenez conscience des ressources que vous utilisez, de vos besoins et des conditions minimales air-sol et eau pour vivre.

Il y a des endroits où ma surface n’est plus habitable. Pas une question de volonté, de caprices ou que les piments ne sont jamais en spécial. Parfois, c’est la montée des eaux, parfois il fait trop chaud.

Même Pélé ne pourrait vous aider, votre corps a besoin de fraîcheur. On ne peut pas suer dans l’humidité. Une température excédant 35°C doit être temporaire pour permettre votre thermorégulation. Sinon, les volcans c’est mon rayon.

La faute à qui, la faute à quoi

Question : agissez-vous à votre échelle ? Pas toujours la faute des autres (voisins, parents, gouvernements, industries, etc.) et insulter ou se plaindre ne sont pas des actions valables. Ignorer l’avancement de la journée du dépassement, c’est peut-être soutenir la déforestation. L’excès de consommation, c’est partout même chez-vous. Si Bury agrandit son dépotoir, si des composés perfluorés sont dans votre réservoir d’eau, est-ce un hasard ?

À force de « déforester », les possibilités de contaminations-cadeaux vont augmenter ! Comme ceux que les conquistadors espagnols ont fait aux Incas et les Européens aux amérindiens.

L’avenir du passé

Comment élever le débat d’un système immunitaire qui n’a pas l’information pour y faire face ? L’arroseur-arrosé pille les ressources et elles le lui rendent bien. Pour certaines zoonoses, l’Humain est un cul-de-sac : il ne peut transmettre la rage. D’autres fantaisies sont plus féroces. Peu importe la quantité de baies de goji mangées, ce ne sera pas suffisant pour Ebola. Une zoonose parmi d’autres que l’Humain transmet à ses pairs. Une de celles-ci a déjà perduré 5 ans ! Au temps des voyages à charrette, de train et de bateau, c’était plus lent à propager, plus facile à contenir – tout le monde n’avait pas les moyens de se déplacer avec un besoin pour sa santé d’aller dans le Sud. Parfois, il s’annonce une tournée en boucle de transmissions récurrentes.

Je suis nostalgique de la Pangée, des continents unis dans la diversité. Peut-être que les lemmings le sont aussi, n’ayant pas changé leur carte mentale de migrations, tombent des falaises en pensant que les continents sont encore attachés. Ces suicides collectifs sont peut-être des parallèles avec l’Humain avec une part cérébrale conservée pour la lutte de sa survie, à consommer comme s’il n’y avait pas de lendemain ?

Avec son dernier livre Paradis perdus, Eric-Emmanuel Schmitt porte ce message. « Noam regarde le passé à travers le présent. En l’occurrence, nous vivons un moment unique: l’Homme prend conscience qu’il est peut-être allé trop loin dans son occupation de la planète, dans son emprise de la nature. » Ah, l’acuité des écrivains ! « Pour la première fois depuis le début de l’histoire, l’humain se rend compte qu’il a peut-être supprimé les conditions à sa survie ».4

Si vous partez coloniser une autre planète, je ne dirai pas bon débarras mais vous souhaiterez du plaisir avec les nouveaux défis (air-sol-eau) et vos nouveaux amis virus et bactéries. Plein d’aventures à découvrir et à détruire, c’est selon.

Elon Musk a-t-il à l’agenda des leçons de bienséance pour ne pas répéter les mêmes erreurs de cette fuite en avant ?

En ce jour de la terre pas besoin de vous dire de faire comme chez-vous, vous êtes bien parti et même parti pour le faire ailleurs aussi !

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