Le travail invisible

Date : 1 mars 2015
| Chroniqueur.es : Viviane Doré-Nadeau
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Quand on parle de travail invisible, on ne parle pas de travail au noir. On parle du travail non rémunéré. Encore de nos jours, ce travail est principalement effectué par les femmes. Il comprend le soin aux enfants, les tâches domestiques telles le nettoyage, la préparation des repas, les réparations, etc. Selon l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), au Canada, les femmes effectuent un peu plus de 4 heures par jour de travail non rémunéré tandis que les hommes en font en moyenne 2,5 heures.

Même si le choix d’avoir des enfants est personnel, il demeure essentiel pour la survie d’une communauté. Alors, cette responsabilité ne devrait pas seulement être prise par les parents, mais bien par la société. Au Québec, suite aux pressions politiques des femmes, les Centres de la petite enfance à prestations universelles ont été développés, et les parents ont droit à des congés de maternité et de parentalité. Grâce aux congés de paternité, les pères développent un lien affectif avec leur enfant en bas âge et ils s’impliquent de plus en plus dans la garde des enfants. Mais ils ont encore souvent l’impression qu’ils sont en appui, même si cette responsabilité devrait être partagée équitablement. Plus de femmes choisissent de travailler à temps partiel pour prendre soin des enfants, ce qui diminue leurs revenus et leur fonds de retraite, déjà qu’elles gagnent en moyenne 10000$ de moins par an que les hommes.

Accès aux CPE menacé

Actuellement, le gouvernement libéral menace l’accessibilité aux Centres de la petite enfance pour les familles. «En plus de surtaxer injustement les familles qui ont de jeunes enfants, la modulation des frais de garde en fonction des revenus représente une menace directe à l’autonomie économique des femmes, rendant les jeunes mères beaucoup plus vulnérables au moment d’une rupture», s’indigne Sylvie Lévesque, directrice générale de la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec (FAFMRQ).

Une coalition pour la conciliation famille-travail-études a été mise sur pied au Québec. Elle représente près de deux millions de femmes et d’hommes. Sa plateforme de revendications portera, entre autres, sur un élargissement de la Loi sur les normes du travail. Les partenaires remarquent la précarisation du travail qui s’accentue avec environ le tiers des emplois pouvant être maintenant considérés comme atypiques et qui, plus souvent qu’autrement, rendent très difficile la prévisibilité en matière de temps de travail (et de revenus).

Les journées de travail s’intensifient de plus en plus, et souvent le temps de travail s’étale en dehors de la semaine régulière. L’exemple du personnel du réseau de la santé et des services sociaux est patent. Plutôt que d’embaucher du personnel supplémentaire et de pourvoir les postes vacants dans le réseau, les employeurs misent sur des stratégies de gestion à court terme et onéreuses en abusant des heures supplémentaires ou du personnel des agences de placement.

Voici des exemples de mesures qui pourraient être intégrées dans la Loi sur les normes du travail: le droit de connaître son horaire de travail à l’avance, le droit de refuser de faire des heures supplémentaires, de vraies périodes de pause et de repas et la rémunération des congés pour obligations parentales ou familiales.

Difficile conciliation famille-études-travail

En 2011-12, grâce à la Conférence régionale des élus de l’Estrie, ConcertAction femmes Estrie (CAFE) a mené une étude sur la conciliation famille-études-travail. Une majorité de femmes se sont senties interpellées (86%), ce qui démontre que la conciliation repose encore largement sur leurs épaules. Dans 81% des cas, elles déclarent que la conciliation est «plutôt difficile» ou «très difficile». Mais lorsqu’on demande aux responsables des ressources humaines, en entreprises, 75% répondent que la conciliation est plutôt facile. Il est clair qu’il y a un manque de communication! Souvent, les mères jonglent seules avec leurs responsabilités et font appel aux grands-parents ou à de la famille pour de l’aide. Ce sont encore les premières appelées par le CPE lorsque l’enfant est malade.

Suite à cette étude, une stratégie estrienne en conciliation famille-études-travail a été développée. Le Centre d’intégration au marché de l’emploi (CIME), aide les compagnies à développer des politiques de conciliation. Ces mesures, souvent peu coûteuses contribuent à alléger le stress et permet le maintien en emploi. CAFE rencontre des tables de partenaires à Sherbrooke et dans les MRC de l’Estrie. Des mesures de conciliation en milieu de travail et dans la communauté contribuent à l’égalité entre les femmes et les hommes. D’ailleurs, ce manque de conciliation influence plusieurs femmes qui refusent des postes de direction ou de se présenter en politique. Au Québec, on ne trouve que 17% de mairesses.

Pour que les femmes vivent dans une société équitable, il y a encore beaucoup à faire en matière de conciliation famille-études-travail.

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