Leçons d’apprentissage

1 août 2008

Été 1969. Les Américains envoient les premiers hommes sur la lune. Au même moment, ils s’embourbent dans la guerre du Vietnam. Au Québec, c’est la première saison des Expos à Montréal, au fameux Parc Jarry. Des jeunes hommes se laissent pousser les cheveux, comme les filles. Oui, les temps changent…

Un été sans point ni coup sûr suit les aventures de Martin, un jeune d’une douzaine d’années qui rêve d’intégrer l’équipe de baseball locale, les Aristocrates, et qui apprendra bien des choses cet été-là. Il vivra alors un moment déterminant dans ce difficile passage à l’adolescence. Notre héros rêveur va prendre conscience que rien n’est acquis d’avance et qu’il faut travailler fort dans la vie pour parvenir à ses fins et aller jusqu’au bout de ses rêves. Refrain connu, mais avec une partition qui demeure tout de même originale.

Touches d’humour et couleurs saturées

Ce nouveau film de Francis Leclerc, de facture grand public, est dans un tout autre registre que ses précédents (Mémoires affectives et le plus discret Une jeune fille à la fenêtre, 2001). Ancré dans la tradition de la comédie dramatique familiale, le film plaira sans doute autant aux enfants qu’à leurs parents, qui apprécieront la justesse de la reconstitution de l’époque.

La mise en images est époustouflante : belles teintes saturées qui donnent l’impression que le film a réellement été tourné en 1969. Des archives d’époque se mêlent aux images évoquant les films familiaux maison tournés en Super 8. Avec Steve Asselin comme directeur photo, ce n’est pas surprenant.
Le jeu des acteurs n’est pas en reste. Le jeune Pierre-Luc Funk (Martin) interprète de façon admirable son rôle de mordu de baseball. Confier un premier rôle à un enfant est toujours crucial. Leclerc a réussi ici son pari.

L’histoire est racontée du point de vue de Martin, qui assume de ce fait la fonction de narrateur. Ses commentaires ironiques, notamment sur son père, font sourire. Patrice Robitaille, qui campe Charles, son père, joue également juste, sans vraiment soulever de vagues. Peu intéressé par le baseball, il tente de se rapprocher de son fils en dirigeant une équipe de recalés. Un véritable contre-emploi pour cet habitué des rôles de trentenaires immatures (Les Invincibles, entre autres). Dans son rôle de mère complice et de femme en quête d’autonomie, Jacinthe Laguë est aussi rafraîchissante. Roy Dupuis s’en tire plutôt bien dans la peau de l’entraîneur intransigeant des Aristocrates. Est-ce une métaphore du conflit au Vietnam ? Sa sévérité envers ses jeunes protégés, son arrogance, m’amènent à faire ce rapprochement. Une partie de baseball perçue telle une guerre entre deux camps ennemis ? Ou simplement le souvenir de Roméo Dallaire que Dupuis a déjà interprété…

En 1969, tout était vraiment beau ?

Le scénario met d’ailleurs en parallèle la petite histoire de l’été 1969 de Martin et la grande, tour à tour réjouissante et angoissante. À ce propos, la très belle scène d’ouverture, magistralement filmée, présente une vision admirable de l’imaginaire d’un gamin contaminé par les événements tragiques de cette période. La séquence du rêve symbolise à merveille les angoisses que les images de guerre télévisée peuvent susciter chez un jeune de 1969…

Le cinéaste pose un regard tendre, sensible et humoristique sur l’époque et ses personnages. Sa démarche n’est pas exempte de défauts. Il semble que Leclerc et son scénariste Marc Robitaille aient voulu aborder dans leur film tous les aspects socio-culturels incontournables de cette époque. C’est ainsi qu’est évoquée l’émancipation des femmes (avec le personnage de l’épouse de Charles), la jeunesse contestataire et les mœurs libérées (évocation de Woodstock, scène du party), et le personnage du mystérieux voisin communiste. Bien sûr, ces détails servent le fond de l’histoire. Tout comme les chansons à succès de la trame sonore, ils sont sans doute nécessaires pour ancrer le film dans l’époque. La société change, pour le plaisir des uns, l’incompréhension des autres (Charles, par exemple). Mais l’étalage m’apparaît un peu trop didactique.

L’originalité réside dans le fait que le film évite les clichés du récit épique de jeunes passant de zéros à héros, l’espace d’un été. Le commentaire social est aussi très pertinent. Il est clair que le nom de l’équipe que Martin rêve d’intégrer n’a rien d’innocent. Ce film est typique du feel-good movie. Son titre est également bien trouvé. Restez à la fin : le générique et la musique qui l’accompagnent en valent la peine !

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