Nos élu·es face à la responsabilité environnementale

Date : 11 septembre 2018
| Chroniqueur.es : Sylvain Vigier
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Le tremblement de terre a eu lieu à plusieurs milliers de kilomètres de Sherbrooke, dans la nonchalance de la fin de l’été, mais la secousse a traversé l’océan pour interpeller le Québec en pleine campagne électorale provinciale. La démission du populaire et médiatique ministre français de «la transition écologique et solidaire», Nicolas Hulot, a fait l’effet d’une bombe certainement à cause de la sincérité du cri d’urgence qu’il a poussé dans un monde politique et médiatique où les phrases creuses s’enchaînent sans conviction pour combler le vide de leur action, mais surtout de leur vision sur le futur du monde face à la menace de la catastrophe environnementale. Car ce qui a marqué dans cette démission, ce sont les justifications qu’il a données à sa décision de quitter le gouvernement. Relisons-les: «[…] Nous faisons des petits pas […] mais est-ce que les petits pas suffisent à endiguer, inverser et même à s’adapter parce que nous avons basculé dans la tragédie climatique. La réponse est «non». La question fondamentale qu’il faut se poser: est-ce que nous avons commencé à réduire nos émissions de gaz à effet de serre? La réponse est «non». Est-ce que ce nous avons commencé à réduire l’utilisation des pesticides? La réponse est «non». Est-ce que nous avons commencé à enrayer l’érosion de la biodiversité? La réponse est «non». Est-ce que nous avons commencé à se mettre en situation d’arrêter l’artificialisation des sols la réponse est «non».»

L’ex-ministre dénonce ici les déclarations d’intention faites par les gouvernements, qu’ils s’appellent Macron, Trudeau ou Couillard, car ces trois mènent globalement la même politique «environnementale». A l’épreuve des chiffres sur l’environnement, le greenwashing des discours et des mesurettes ne tient pas. Et finalement, Nicolas Hulot va lâcher la bombe que tout le monde connait dans son fort intérieur sans vouloir se l’avouer tant cette vérité nous confronte dans notre vie de tous les jours: «[…] On n’a pas compris que c’est le modèle dominant qui est la cause. Est-ce qu’on le remet en cause? […] On recherche une croissance à tout crin. Sans regarder ce qui appartient à la solution et ce qui appartient au problème. Quand on se réjouit de voir sortir de Saint-Nazaire un porte container qui va porter 50 000 containers, superbe performance technologique. Est-ce bon pour la planète? La réponse est non. […] [E]st-ce qu’on essaie un peu d’être disruptif? D’investir dans la transition écologique? […] [E]st-ce qu’on s’est autorisé à essayer un petit peu de sortir de l’orthodoxie économique et financière?».

Nicolas Hulot n’est pas un «gauchiste – marxiste», un bref aperçu de sa carrière le prouve. Ce n’est donc pas par idéologie anti-capitaliste qu’il questionne notre modèle économique actuel. Et c’est pour cela que sa démission jette un vrai pavé dans la marre médiatico-politique. Et c’est une bonne nouvelle que cette bombe explose en pleine campagne électorale, car une bonne partie de la solution environnementale va reposer sur les décisions de ceux et celles qui nous gouverneront après le 1er octobre. Est-ce que les candidat.es au poste de député.e ont pris conscience de la gravité de la situation? Quelles mesures concrètent ont-ils à nous proposer pour changer le cours des choses? Est-ce que dans leur conception de ce qu’un dirigeant politique doit faire, la question de l’environnement est centrale ou accessoire? Nous avons envoyé un questionnaire aux 6 candidats et candidates officiellement déclarés à Sherbrooke afin de mieux connaitre leur personnalité et leurs objectifs d’action politique. Notre responsabilité d’électeur réside aussi dans notre capacité de choisir la candidature qui propose un vrai changement face à la question environnementale. Cependant, la responsabilité finale d’une réussite ou d’un échec retombera sur nos élu.es, car ce sont eux qui possèdent les leviers d’action gouvernementale. Si des intérêts économiques particuliers gouvernent leurs actions plutôt que l’intérêt général d’un monde vivable pour tous, alors les élu.es devront rendre des comptes. Parce que cette fois c’est sûr, ils et elles ne pourront pas dire qu’on ne savait pas.

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