Une leçon d’humanité

Date : 27 avril 2020
| Chroniqueur.es : Dominique Vigneux-Parent
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J’ai lu un jour, il y a plus de vingt ans de cela, que l’anthropologue Margaret Mead affirmait que le premier signe de civilisation dans l’histoire était, d’après elle, un fémur cassé puis guéri. Ce fémur étant la preuve qu’une personne a pris le temps d’accompagner une autre personne blessée, de soigner sa blessure, de l’emmener dans un endroit sûr et de l’aider à se remettre tranquillement. Aider quelqu’un qui vit des difficultés serait donc le moment où la civilisation commence.

Alors que j’avais toujours attribué l’origine de la civilisation à la maîtrise du feu ou à la fabrication d’outils, cette affirmation venait ébranler mes certitudes et m’avait profondément fait réfléchir. Je dirais même qu’elle m’a accompagnée tout au long de mes études en anthropologie et même ensuite en tant que travailleuse dans le milieu communautaire.

Et si la leçon que nous avions à tirer de cette crise du COVID-19 était une leçon d’humanité? Si cette crise était une occasion pour nous en tant que société de repartir sur de nouvelles bases pour développer une société plus solidaire, une société qui se soucie et prend soin les uns des autres, une société qui ne laisse pas tomber les plus vulnérables. Car cette crise nous remet vraiment en pleine face le non-fonctionnement de notre modèle actuel de société, vous ne trouvez pas?

On a beau vouloir se dire que  « ça va bien aller », mais en réalité, on ne peut que constater que ça ne va pas bien aller pour tout le monde. Car notre modèle de société, au lieu d’aider les populations à améliorer leur sort, favorise plutôt les inégalités. Les gouvernements ont tellement coupé dans les programmes sociaux au fil des 30 dernières années, que le filet social qu’il nous reste est troué au point que, même nos propres parents et grands-parents sont oubliés.

On voit aussi que les directives de santé publique (lavage fréquent des mains et confinement) sont complètement inappropriées pour une partie de la population. Comment être en confinement lorsque nous vivons dans la rue? Comment se laver fréquemment les mains quand on n’a pas accès à l’eau? Nous sommes donc totalement inégaux face au virus, face à notre capacité de faire face à cette catastrophe et de se relever. Car ce que nous vivons actuellement est bien une catastrophe. Du grec cata : coupure et strophe : tournant. Le choix des mots est important, car dans ce mot, il y a l’idée d’une rupture avec nos anciennes façons de faire. L’idée  de repartir sur de nouvelles bases, mais pas comme avant. J’espère que cette catastrophe est assez grosse pour nous faire réfléchir collectivement et faire les bons choix pour le futur.

Je sais, c’est plus facile à dire qu’à faire, mais ce soir, j’ai besoin de donner un sens à cette crise et de garder espoir en l’humanité. Alors j’ose rêver! J’ose rêver que ce satané virus soit une occasion de repartir sur de nouvelles valeurs plus humaines qui ne laissent personne derrière.

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