Es comme dans « Escalier lugubre »

Date : 8 avril 2012
| Chroniqueur.es : Alexandre Demers
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Qui dit Halloween dit obligatoirement lieux sombres et inquiétants : cimetières, maisons hantées, cirques abandonnés, villes fantômes, bureaux de comptables, etc. Figurez-vous qu’on retrouve plusieurs endroits de ce genre à Sherbrooke, et bien souvent, tout près de nous. Dans le cadre de cette chronique sur les endroits méconnus de la ville, je vous présente l’un de ces lieux lugubres. Aujourd’hui, je ne parlerai que d’une simple volée de marches : rien de bien menaçant vous vous dites… L’important, c’est que j’en suis revenu vivant.

La volée de marches que j’ai visitée se trouve dans un immeuble à logements qui possède quelques commerces à son rez-de-chaussée. Mon ami, que j’appellerai S. pour les besoins de cet article, vit au tout dernier étage de cet immeuble. À sa demande, son nom et le lieu exact resteront anonymes. Les marches font partie de ce qui semble être la section arrière de l’immeuble condamnée il y a bien des années. On devait pouvoir y accéder par deux portes (maintenant verrouillées), dont l’une d’elles donnant sur une ruelle. Aujourd’hui, le seul chemin pour y entrer se trouve sur le toit.

Pour les besoins de cette enquête / chasse aux fantômes, on m’a gracieusement prêté une jolie lampe frontale et une lampe de poche. Par chance, je pouvais toujours utiliser le flash de mon appareil photo afin d’éblouir les éventuelles créatures que je risquais de rencontrer plus bas. Et bien entendu, avant que je ne descende, mon ami S. me donna quelques bons conseils pour ma sécurité : « Fais attention aux clous, et en descendant, marche en écartant les jambes pour éviter les planches pourries. »

Descendre le premier escalier fut quelque peu difficile, en bonne partie à cause des fameuses marches pourries que je devais surveiller attentivement. La décoration laissait un peu à désirer : papier peint défraîchit depuis des siècles, murs inachevés, poussière omniprésente. Tout en bas, je me retrouvais face à la porte donnant sur la ruelle. Même verrouillée à bien des endroits, on pouvait distinguer les bruits de la ruelle par de petits trous d’aération à même la porte. L’ouverture du toit et ces trous constituaient les seules sources de lumière ambiante.

Visiblement, je me trouvais dans un local de service, entouré par les boîtes à fusibles et les compteurs de l’hydro. Rien de tout ça ne semblait fonctionner, ce qui expliquait l’absence de courant pour alimenter le plafonnier. Outre l’accès vers la ruelle, on y trouvait aussi une énorme porte d’acier, qui, à mon avis, donnerait sur l’arrière d’un commerce, ou sur une ruelle maintenant bouchée. En résumé, rien de vivant autour de moi, et aucun fantôme en vue.

Je me doutais que mon exploration n’allait pas se terminer là. En déplaçant quelques planches de bois appuyées sur le dos de l’escalier principal, voilà que je découvrais un deuxième escalier menant au sous-sol. La hauteur du plafond et de la noirceur ambiante rendait l’accès à cet espace encore plus difficile. Merci à la lampe de poche. Le sous-sol, ou plutôt devrais-je dire demi sous-sol, était couvert de détritus en tout genre ainsi que d’une importante quantité de mousse isolante sur laquelle je devais marcher. Rien de bien passionnant ici mis à part que je frissonnais à l’idée de voir sortir quelques rats cachés sous la mousse. Sur les murs, de vieilles publicités de Kodak représentaient l’unique intérêt à cet endroit. Ces vieilles affiches cartonnées et défraîchies, avec un examen approfondit, pourraient me donner une date approximative de leur disposition. En l’absence de meilleures références, je ne peux qu’évaluer qu’elles ont été mises là dans les années 50 ou 60 par un quelconque vendeur de matériel photo. Quant aux détritus (du bourrage de boîtes en tout genre), on peut évaluer qu’un malheureux les a jetés ici au cours des vingt dernières années.

Au final, le plus lugubre a été de descendre à cet endroit avec une lampe sur le front qui s’éteignait sans cesse. Remonter vers la sortie a été encore plus éprouvant, d’autant plus que se déplacer sur de la mousse isolante n’avait rien de plaisant. Et en revenant à l’air libre sur le toit de l’immeuble, je me rendais compte que je n’avais été attaqué par une seule chose : la poussière. Pas d’attaque de zombie, pas de chauve-souris, encore moins de fantômes d’anciens occupants, ou de squelette du chat perdu de mon ami. Rien de tout ça. Si jamais lors de la visite d’un endroit semblable je fais la rencontre d’un esprit, il sera malheureusement trop tard pour le raconter dans un numéro spécial Halloween.

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